JOURNAL POETIQUE T7

Publié le par Marc BERNELAS

 

Maman ,

Hors la cour commune 

-journal poétique T7-

 

Ce treize Mai d’il y a…

En l’an d’avant 2000

Elle referma sur elle

Sa dernière porte quitta

La cour commune… MAMAN…

 

Elle habite – j’y veux croire

Y croire oh oui ! Bon Dieu !-

Du côté des étoiles

Voyage en des pays

Que tracèrent les espoirs

Et les rêves des vivants

 

Y croire et croire encore

Elle chantonne par les vents

Ces berceuses qui si bien

M’apaisaient quand j’étais

Petit homme accroché

A son flanc à sa voix

 

Croire et croire ! Rage de croire !

Elle pavoise l’univers

Elle-Colette-ma mère-M’man

De ses mots rires et larmes

De la houle maternelle

Où j’allais reposer

 

Mais…

 

N’est-ce mirage

Cette parole

D’homme de fils de poète

Portée contre un silence

Dont rien

Ne donne  mesure ?

Est-ce grandir que céder

A la mort cet écho

Ricochant de la mère

A l’enfant – Ce babil

Cette couture de l’intime- ?

 

Est-ce grandir qu’un matin

Ne plus dire à personne :

« Maman tu Maman je » ?

« Maman » le mot

Que désormais

Je ne dirai chuchoterai

Qu’en regardant des photos

Ou en conversant :

« Maman elle… »

 

Le savoir n’y pas croire

Et pourtant…

Si les douleurs

Etaient à fuir

Celle-là fut à vivre

Cette mort cette perte

La grande perte

D’une aile protectrice

Le savoir n’y pas croire

Mais le dire l’écrire

L’écrier…

 

Ce douze Mai d’il y a …

En l’an d’avant 2000

J’entrai dans l’hôpital



Et mon pas dans les pas

De mon père pénétrai

Le domaine où la mort

Attire éteint étreint

Toute l’humaine procession

Et je la vis

Ma mère

Si jaune

Sur les draps si blancs

Que « Maman » devint nom

Egaré incertain

Sur un corps

Où quelqu’un d’autre

« L’inconnue »

Se lovait telle vermine

 

Jaune sa chair qui perdait

Peu à peu sa chaleur

Jaunes ses yeux

Dont le mal

-Le cancer- avait fauché

Les sourcils

(Ah ces yeux ronds

De hibou terrifié !)

Jaune sa main

Dans ma main

Sa main dure

De bois  mort

Jaune son crâne

Qu’une perruque

Indocile dénudait

Au gré de gestes

De naufragé

 

Clap de fin

Ce fut la dernière fois

Que je la vis « être »

Dans cette solitude

Des mourants

 

Aujourd’hui je me dis

Qu’elle se sera bien battue

-Trois ans-

La petite chèvre

Et que sa mort

Libéra la parole

D’un clan plutôt taiseux

(Mon père mes frères

Et moi échangeâmes

Des larmes et des mots

Les mots qui disent

Et les mots qui cachent)

 

Aujourd’hui je ne sais

Quelle image

Garder d’elle

Elle est devenue

La somme de ses images

 

Aujourd’hui je regarde

Une photo et c’est comme

Une prière

Moi le mécréant

Je VEUX CROIRE

Croire en l’ « après »

L’ « après » de la vie

Je VEUX ESPERER



Qu’elle est « autre »

« Quelque part »

Et qu’elle veille

Sur mon pas…

 

« Maman »

 



 





Publié dans POEMES

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